Un SUV électrique ...


« Un SUV électrique à gros prolongateur d’autonomie »

Cette formulation de Patrick Gourvennec, président de Mitsubishi France, peut prêter à sourire. Ce n’est après tout qu’une hybride capable de rouler une cinquantaine de kilomètres grâce à une recharge sur secteur, et plusieurs centaines de kilomètres grâce au réservoir d’essence !

Ce n’est pourtant pas une boutade : c’est bien ainsi que le constructeur a conçu l’auto. C’est une voiture à moteur thermique conçue à partir d’une voiture électrique et non l’inverse. La démarche est jusqu’à présent unique et la formule cache une petite pierre dans le jardin de l’ensemble des concurrents qui investissent le créneau des PHEV.

La voiture utilise un mode électrique et deux modes hybrides.

  • Le mode électrique (EV) est de fait le mode naturel de la voiture. La batterie alimente deux moteurs électriques, un par essieu, avec des transmissions fixes. Aucune boite de vitesse, accélération sans à-coup : une pure électrique n’est pas conçue différemment.  Notons au passage que sauf erreur, l’Outlander est le seul SUV rechargeable qui peut se permettre de rouler sans démarrer son moteur essence en mode 4 roues motrices.

NB : les moteurs électriques ne sont pas représentés sur les diagrammes, il faut considérer qu’ils s’intercalent entre la batterie et les roues.

  • Le thermique démarre de lui-même si la puissance sollicitée par le conducteur est supérieure à la puissance de la batterie (ou si cette dernière est épuisée bien sûr). Il démarre également si le conducteur souhaite que la batterie ne se décharge pas, auquel cas il suffira d’activer l’un des deux modes Save (maintien du niveau de charge de la batterie) ou Charge (augmentation du niveau de charge).

Dans ce fonctionnement qui sollicite le thermique, dit hybride, le système choisit de fonctionner selon deux modes possibles, sans intervention du conducteur : hybride série ou hybride  parallèle.

  • Mode hybride série : le moteur thermique actionne un puissant alternateur, lequel alimente les moteurs électriques, et peut simultanément maintenir la charge de la batterie ou même la recharger. Il n’y a pas de liaison physique entre le moteur à essence et les roues, et de ce fait en ville on bénéficie également de la sensation de conduire en douceur un véhicule électrique, si ce n’est le son très discret et lointain, et totalement exempt de vibrations, du moteur thermique. Ce mode est capable d’offrir 130 kW (176 ch), soit la puissance cumulée des deux moteurs électriques.

NB : l’alternateur n’est pas représenté, il s’intercale entre le thermique et la batterie

  • Mode hybride parallèle : le moteur thermique est directement embrayé sur les roues avant (avec un rapport de démultiplication unique) ce qui permet d’éviter les pertes d’énergie du mode série engendrées par la transformation de l’énergie mécanique en énergie électrique. Ce mode permet également de pousser la puissance au-delà de 130 kW. En parallèle, les moteurs électriques peuvent fournir à leurs essieux respectifs si nécessaire un supplément de puissance provenant de la batterie.

Le mode parallèle ne peut s’actionner qu’à des vitesses supérieures à 65 km/h (donnée inchangée par rapport à la version précédente). C’est toujours la voiture qui décide.

Il est impossible de sentir le thermique embrayer aux roues : bluffant ! Seule la transmission e-CVT des hybrides Toyota est capable de produire cette sensation de continuité de la transmission qui rend la conduite aussi zen.

  • Signalons aussi la touche EV, apparue au millésime 2017 et chargée d’empêcher le thermique de démarrer quelle que soit la position l’accélérateur (à moins de passer un seuil qui peut s’apparenter au kick-down des BVA classiques). La voiture est désormais capable d’atteindre 135 km/h en restant en mode électrique (120 pour l’ancien modèle) : bien vu, certains apprécieront sans doute.

Ce PHEV est également connu pour ses palettes au volant destinées à doser le freinage régénératif selon 6 degrés B0 à B5. Le mode B0 correspond au mode « roue libre » : le lever de pied n’entraine aucune régénération, et en l’absence de frein-moteur la voiture continue longtemps à rouler sur son élan, ce qui peut être surprenant. Ce mode demande une forte anticipation de la part du conducteur, qui sera en retour gratifié d’une moindre consommation d’électricité.

B1 récupère quant à lui l’énergie de façon imperceptible, au point qu’on peut se demander si ce niveau est vraiment nécessaire.

B2 est le niveau standard, c’est-à-dire celui qui sera activé par défaut si on ne touche jamais aux palettes. Dans ce cas il sera d’ailleurs affiché en tant que mode D (Drive) au tableau de bord. Il correspond à un niveau de ralentissement au lever de pied qui se rapproche le plus d’une voiture ordinaire (frein-moteur).

Passons sur B3 et B4 (ce dernier ayant un intérêt à peu près aussi limité que B1) pour en arriver au mode B5, qui vous l’aurez compris permet de freiner le plus fortement la voiture juste en soulageant l’accélérateur. Ce réglage est très agréable en ville puisqu’il permet d’éviter la plupart des allers-retours du pied entre pédales d’accélérateur et de frein. Quand on y a goûté …

Devinette : quelle est la puissance maximale de cette machine complexe ? Mitsubishi préfère désormais ne pas fournir la réponse. Il ne se privait pourtant pas de le faire en annonçant 201 poneys pour la version précédente, qui correspondaient très exactement à l’addition des puissances batterie + moteur essence.

Ne nous privons pas de faire la même addition sur le modèle 2019, et à moins d’un bridage apparu sur ce millésime pour une raison qui nous échapperait, nous disposons donc, à plus ou moins 1 cheval près, de 224 ch : les 135 ch du 4 cylindres plus les 89 ch de la batterie.

Mais comme on l’a vu, cette puissance ne peut être obtenue qu’en mode parallèle, et qui plus est seulement aux alentours de la vitesse maximale de la voiture (bridée à 170 km/h).

Autant dire qu’en France, en restant dans la légalité, cette cavalerie ne sera jamais mise en œuvre.

En Allemagne c’est possible, mais cela restera très rare car sur route plate la voiture n’a pas besoin d’autant de puissance pour maintenir 170 km/h. Je laisse les lecteurs spéculer sur la déclivité de la côte nécessaire pour réellement utiliser nos 224 ch à 170 km/h !

Il n’est finalement pas si étonnant que Mitsubishi souhaite éviter d’évoquer cette puissance cumulée qui, si elle n’est pas tout à fait virtuelle, a toutes chances de ne jamais être atteinte dans la vie de la voiture. Pas plus que la précédente motorisation n’atteignait les 201 ch, d’ailleurs.

Sortons donc de la théorie et revenons en France. A des vitesses plus courantes, nous disposons à tout moment de la puissance du mode série, comme on l’a vu de 130 kW soit 176 ch. A ce niveau de puissance le thermique monte dans les tours en maintenant son régime de rotation de façon continue, comme le ferait une boite CVT. Efficace, mais attention au petit délai de réaction du moteur thermique (une à deux secondes), qu’il vaut mieux anticiper. Pour cela l’activation du mode Charge ou du mode Sport est conseillée.

Notons que l’ancien modèle ne délivrait « que » 161 ch à ce même jeu : toujours ça de pris.

Certains trouveront ces progrès trop modestes. Il est vrai que lors de l’essai, malgré toute notre attention, nous n’avons pu constater une différence de performances par rapport à la motorisation précédente. Il faut dire que la voiture est un cocon qui gomme les sensations. Seul le chrono peut donc mesurer cette différence, et pour cette fois nous ferons confiance à celui du constructeur : 0,3 s de moins sur 0-100 km/h. Bref, inutile de revendre votre ancien PHEV au profit du 2019 juste parce que vous trouvez que le vôtre n’accélère pas assez fort !

En fait, c’est en mode électrique qu’on appréciera vraiment le progrès de cette motorisation, mais nous y reviendrons. Il est temps de prendre la voiture en main.

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