Netflix vient de mettre en ligne leur première série produite en France : Marseille. Annoncée comme une «House of Cards» made in France, avec un casting cinq étoiles (Gérard Depardieu et Benoit Magimel), la série Marseille est-elle à la hauteur de ce que Netflix annonce ? Après quelques heures de visionnage, je vais essayer de vous donner mon avis.
Synopsis : quelle est l’histoire de la série Marseille ?
L’histoire de la série tourne autour de deux axes principaux :
- Le duel politique entre Robert Taro (incarné par Gérard Depardieu), maire de Marseille depuis 25 ans, et son premier adjoint, Lucas Barrès (joué par Benoit Magimel)
- Une relation amoureuse triangulaire entre Julia la fille du maire, son ex Eric (qu’elle considère comme un frère) et le meilleur ami de son ex : Selim.
Et pour enrichir cet environnement, il y a un projet de construction de casino que la mafia locale tente de stopper, la femme du maire (Géraldine Pailhas), et le parti UPM (tout le monde aura compris que c’est l’UMP).
Où est le scénariste ?
Bon, je vous dis tout de suite : j’ai eu beaucoup de mal à m’immerger dans cette série, je suis pourtant un public facile.
Si les trois quarts de la presse décrivent cette série comme un «navet» ou une «catastrophe», beaucoup peinent à expliquer pourquoi … je vais tenter d’analyser, en tant que téléspectateur, ce qui n’a pas marché pour moi.
Action réaction : pas de réaction dans Marseille
Dès les premiers épisodes, on a du mal à comprendre pourquoi Lucas Barrès, désigné par Robert Taro comme son successeur, se retourne brutalement contre lui, si ce n’est que pour avoir le soutien de la mafia locale, au risque de retrouver son mentor comme adversaire aux élections.
Le téléspectateur a donc du mal à comprendre les enjeux de cette trahison et de suivre le suspense de la série et cette réponse tarde à être donnée. Contrairement à House of Cards où la cause est expliquée dès les premiers instants de l’épisode : Frank Underwood est déçu de ne pas être nommé comme secrétaire général, promesse non honorée par le Président, le public approuve en quelque sorte le plan machiavélique qu’il élabore par la suite, car il s’agit d’une vengeance justifiée; dans Marseille, on passe son temps à se demander s’ils ne sont pas débiles.
Pour moi, ce qui a vraiment merdé dans cette série, c’est qu’on a oublié l’enjeu essentiel de la vie politique : comment résoudre un incident ?
Quand on regarde cette série Marseille, on a l’impression qu’il y a des problèmes qui surgissent, mais après, tout le monde vit comme si de rien n’était.
Par exemple, pour le vote de vente de l’emplacement réservé au casino, il y a eu le revirement soudain de Barrès et le meurtre d’un représentant de vote (une juge) le jour même du vote.
Après tout ça on peut s’attendre à des retombés. Comment Barrès justifie son revirement à son entourage politique, que la police tente de faire le lien entre ce vote et le meurtre ? Comment la mairie va gérer la mort du projet aux investisseurs ? Rien… On s’attend à action – réaction, mais il n’y a aucune réaction logique dans la série.
Le maire ne cherche pas à comprendre plus que ça et le promoteur immobilier ne cherche pas non plus à sauver le projet (à part une boutade lancée au maire, comme si il avait simplement oublié d’acheter les croissants pour eux).
De même pour une autre scène, dans une soirée: Julia, la fille du maire, flirte avec Selim, le pote de son ex Eric (après tout, les deux jeunes hommes ont braqué une banque ensemble).
Eric arrive pour s’interposer et il se fait frapper violemment par Selim. 10 secondes après on voit que Julia couche avec Selim, mais le lendemain matin elle essaie à tout prix de joindre Eric car elle est inquiète pour lui. On se dit : si elle était vraiment attachée à lui, elle n’aurait pas couché avec son agresseur, non ?!
Et la série Marseille est truffée d’autres actions-réactions illogiques : le chef du cabinet de Taro lui dit en pleine réunion d’équipe qu’il n’a aucune chance d’être réélu, mais aucune explication n’est donnée et personne ne se demande pourquoi. La secrétaire générale du parti UPM préfère abandonner son éléphant (qui détient des secrets du parti), au profit du jeune Barrès pour une vieille histoire de cœur, là aussi, elle n’a pas besoin de justifier son action auprès des autres.
Magimel prend l’accent marseillais quand il veut
Le jeu d’acteur est un autre problème. Si certains jouent plutôt bien leur rôle (le couple Depardieu et Pailhas), on sent que quelque chose perturbe le jeu des autres acteurs.
Par exemple, Benoit Magimel est certainement une erreur de casting pour l’interprétation de Lucas Barrès.
Il a vraiment du mal à être dans la peau d’un requin politique, sensé être bon baratineur et excellent manipulateur.
En effet, il a du mal à jouer ce rôle avec l’accent marseillais (car il a du mal à garder l’accent le long de la série), et prendre un air de voyou arrogant n’arrange rien (il a peut être tenté de recopier le style de communication de Nicolas Sarkozy, mais en réalité ce n’est pas du tout cet esprit).
https://twitter.com/Freezze/status/728210469698293760
Sexe : HBO et vulgarité
Entre les scènes de sexe à peine exagérées et les dialogues trop crus, le film nous éloigne de plus en plus de son histoire…
Par exemple, à un moment donné, Gérard Depardieu dit à sa fille : «J’aime que ta coloc baise beaucoup, car quand elle baise, tu es là»… on a l’impression de retrouver le personnage de DSK qu’il a interprété dans le film «Bienvenue à New York» et qui a harcelé le copain de sa fille : « Alors vous baisez beaucoup ?»
Difficile d’imaginer les hommes politiques de ce range parlent de façon aussi crue…
J'en peux plus. #Marseille pic.twitter.com/tDhhrHRFUC
— Charly M. (@SeriousCharly) May 5, 2016
Marseille : une série qui peine à être crédible
Le problème de la série Marseille est : la crédibilité.
Si on passe les montages bizarres (des scènes au ralenti et des flash-back de dialogue à une répétition agaçante), entre un scénario politique pas crédible, des dialogues pas crédibles, un jeu d’acteur pas crédible et même les scènes de sexe ne sont pas crédibles, en tant que téléspectateur, on peine vraiment à s’immerger et de s’intéresser aux suspenses de la série (il n’y en a pas vraiment, d’ailleurs).
C’est un véritable désastre en critiques pour cette première production Netflix européenne : pourtant, il y a deux ans, la France était très fière d’être sélectionnée comme le premier pays européen désigné par la plateforme de distribution / production américain (voir “Marseille” : le House of Cards à la française de Netflix se dévoile)
La question est : Comment a-t-on pu en arriver là ? Car le budget ne semble pas d’être un problème ici…
Voir aussi : Aïe, la série “Marseille” se fait aussi flinguer à l’étranger
La question finale est bonne !Si quelqu'un a un début de réponse …
Normal c'est Français !L'idée y est peut être mais le résultat n'est pas là!Certainement un problème de casting et donc de crédibilités pour cette série qui me semble bien moyenne.